Oui ou non, le principe de libre installation professionnelle et de libre circulation des capitaux à l'intérieur de l'espace européen commande-t-il que tout un chacun puisse demain devenir propriétaire d'une (ou plusieurs) officines pharmaceutiques ?

En d'autres termes, des sociétés purement capitalistes qui ne seraient pas détenues par des pharmaciens doivent-elles se trouver autorisées à créer des réseaux d'officines, éventuellement en contradiction avec les lois nationales des Etats-membres ? L'avocat général près la Cour de Justice des Communautés européennes Yves Bot, vient de répondre par la négative. Sans ambigüité, affirmant que la pharmacie doit rester le métier du… pharmacien !

Rejetant comme non fondé un recours de la Commission contre la République italienne, il estime en effet « que l'impossibilité pour les entreprises de distribution de produits pharmaceutiques de prendre des participations dans les sociétés de gestion de pharmacies communales est justifiée au regard de l'objectif visant à garantir un niveau élevé de protection de la santé publique. » Il précise également dans ses conclusions rendues aujourd'hui à Luxembourg, que cette interdiction « offre une garantie supplémentaire qui permet d'éviter (…) les risques de conflits d'intérêts qui pourraient naître de la participation de cette catégorie d'opérateurs économiques à la gestion des pharmacies communales. »

Il ressort de cette conclusion, que le médicament n'est pas considéré par la Cour comme une denrée commerciale tout-à-fait ordinaire. Cette notion quoi qu'on en dise, méritait sans doute d'être rappelée. Ce même jour à Luxembourg, une autre affaire opposait la chambre des pharmaciens de la Sarre en Allemagne, au ministère de la Santé de ce Land, qui avait autorisé l'ouverture d'une succursale de la société anonyme de vente par correspondance de médicaments DocMorris NV, d'origine néerlandaise.

Il s'agissait là encore de dire si le droit communautaire permettait à une société purement commerciale, sans attaches pharmaceutiques, de s'établir pour vendre des médicaments. Là encore l'avocat général a excipé de l'exception pharmaceutique. Considérant que « dans la mesure où les médicaments (…) peuvent, en cas de mauvaise utilisation, entraîner la mort de leurs consommateurs, (…) leur délivrance doit être entourée de garanties particulières. Ainsi, il nous paraît légitime qu'un Etat Membre souhaite atteindre un niveau élevé de protection de la santé publique en tentant de préserver la qualité et la neutralité de l'acte de dispensation des médicaments. » D'où il ressort que « les articles 43 CE et 48 CE (…) ne s'opposent pas à une législation nationale en vertu de laquelle seuls des pharmaciens peuvent détenir et exploiter une pharmacie. »

Source : Cour de Justice des Communautés européennes, 16 décembre 2008

Vous voyez... ;-)

Personnellement je ne vois rien, je lis ;-)

Les conclusions du magistrat rejoignent les revendications de la profession, ce que ne laissait pas augurer l'ouverture du capital des laboratoires de biologie médicale, mais elles n'ont pas valeur de décision, même si en pratique la cour de justice a tendance à se ranger aux conclusions de l'avocat général, cela reste de son ressort de trancher en dernière instance.

Quid des nombreux officinaux qui attendaient cette opportunité pour céder à très bon compte leur fonds à ces nouveaux acquéreurs ? :-o

Quid de ces nouveaux intervenants qui s'étaient mis en ordre de bataille ?

Une nouvelle tentative à lancer rapidement, ou bien alors un dernier rebondissement de la part de la cour de justice, souveraine en la matière, avec à la clef la jurisprudence que l'on connait ... :#

La pharmacie sera toujours un gâteau appétissant. Sinon, pour les joueurs, ben je pense que s'ils n'ont pas compris par les temps qui courent qu'on pouvait perdre aux jeux d'argent, vaut mieux leur conseiller de changer de hobby. Se confire dans ses certitudes n'a rien de bon et on peu dire que des certitudes, il y en avait pas mal dans l'air. Maintenant, rien n'est jamais acquis pour personne...
Quant aux batailles, il faut toujours des gagnants et des perdants. La seule chose qui a jamais été sûre, c'est qu'il n'y a que ceux qui sont dans les batailles qui gagnent. ;-)

Ce n'est pas parce que l'avocat général s'y oppose que les juges suivront.
Je m'attends encore à un sacré lobbying des principaux intéressés...

Les principaux intéressés sont dans les deux camps. ;-)

Les principaux intéressés... par la part du gâteau, bien sûr... ;-)

Pour approfondir un tout petit peu, et même si comme tu le dis il s'agit d'attendre la décision finale, on peut en tout cas dire que beaucoup de chemin a été fait pour en arriver là, n'est-ce pas ? Et que la désuète notion de santé publique a semble-t-il encore de la valeur aux yeux de quelques personnes. L'affirmation que notre secteur et les produits que nous vendons ne sont pas comme les autres est importante quand elle sort de la bouche de l'avocat général de la cour européenne.
Les indices d'un tel résultat étant apparus il y a de cela pas mal de temps (même au début de nos conversations sur le sujet, il y en a toujours eu pour dire que rien n'était scellé...), je ne suis pas sûr que les évènements qui bouleversent le monde aujourd'hui ait eu un impact réel sur cette "prise de conscience", mais ça n'a sans doute pas contribué à inverser la tendance.

Message édité par : Whoops / 17-12-2008 12:19

je me demande d'ailleurs si la crise actuelle n'aide pas à se dire que les différences d'un pays à l'autres ne sont pas respectables et que trop d'uniformité peut causer des pbs...

D'ici à ce que Beigbeder nous ponde un best seller intitulé: " le dernier monopole"... avant pâques pour faire sonner les cloches... dans l'absolu: tout est possible.

Ca fait un bail que les cloches n'ont plus besoin de personne pour sonner.