Tout n'est souvent que querelle de microcosmes... Car la pensée unique a tendance à régner dans les courants politiques également. Et tout le monde se contredit systématiquement à partir du moment où 2 idées opposées se confrontent. Mais si vous voulez des arguments, et pas simplement des affirmations ou des concepts dogmatiques comme peut en porter M.Blur qui n'est pas plus crédible qu'un autre spécialiste du monde officinal et qui par ailleurs n'avance pas d'arguments chiffrés et solides, en voilà... C'est peut-être long, mais il faut aussi savoir ce qu'on veut. Ne liront que ceux que la question intéresse :
Le monopole pharmaceutique n’est pas un monopole capitalistique, mais un monopole de compétences
Parfaitement construit depuis 60 ans alors que parallèlement la reconstruction des autres professionnels de santé sera longue et coûteuse, le monopole pharmaceutique n’est pas un monopole capitalistique mais un monopole de compétence.
Le médicament est un et indivisible, qu’il soit de prescription médicale facultative ou obligatoire.
Tous les médicaments dispensés sur le territoire français font l’objet d’une AMM sous l’autorité de l’AFSSAPS afin d’en évaluer l’intérêt bénéfique/risque. Chaque médicament a des effets curatifs mais toujours aussi, malheureusement, des effets délétères.
Nous remarquons d’ailleurs, que le plus grand marché pharmaceutique mondial (USA) modifie ses règles en revenant vers des possibilités d’achat plus restrictives dans les officines, avec un accès limité, afin de réduire les coûts d’hospitalisation engendrés par des consommations erratiques de médicaments.
Quant à l’évolution des prix, les derniers exemples de libération de marché en Europe n’ont apporté aucune évolution positive. En effet, des hausses ont été observées au Portugal (max 2 %) et en Norvège ou l’augmentation varie de 15 à 40 %.
De plus, la spécificité du marché français avec une fixation des prix au niveau de l’industrie a entraîné des prix artificiellement bas. Nous constatons d’ailleurs lors de la libéralisation du prix d’un médicament du fait de son déremboursement, une augmentation des prix industriels variable de 30 à 200 %, pour les exemples les plus récents.
La profession a passé, depuis quelques jours un accord de mise en accès libre de certains médicaments à prescription médicale facultative avec en corollaire la création d’un observatoire de prix indépendants.
Le pharmacien d’officine, un professionnel indépendant des pressions capitalistiques
La question posée est celle de l’indépendance de l’acte du professionnel de santé vis-à-vis de son patient.
Il est en effet primordial que chaque citoyen français puisse bénéficier d’un service pharmaceutique professionnel, indépendant, des pressions extérieures à une décision de santé.
Malgré les contentieux avec la Commission Européenne, la majorité des états de l’Union ont maintenu la propriété de l’officine aux professionnels pharmaciens pour des notions évidentes d’indépendance.
On peut affirmer qu’aujourd’hui 60 % des pharmacies européennes sont la propriété exclusive du pharmacien.
Dans le même temps, certains états européens ayant connu le joug communiste reviennent vers des règles de propriété réservées aux professionnels suite à la mise en place de règles ultralibérales après leur libération de l’emprise soviétique et aux dérives capitalistiques dommageables dans les secteurs de la santé publique. C’est le cas de la Lettonie et de la Bulgarie.
L’ouverture du capital a toujours eu pour conséquence une concentration de celui-ci entre les mains de quelques uns dont le seul but est la rentabilité de leur capital et non un quelconque critère de santé publique.
Nous constatons enfin, en Europe, là où la libéralisation s’est appliquée, l’arrêt des services non rentables : en Irlande et en Norvège, le service de garde pharmaceutique a été transféré sur les hôpitaux publics, d’où une augmentation des charges de l’Etat.
Un peu plus sur le numerus clausus ? (en gras le rapport Attali)
Page 76 du rapport Attali – décision 72 :
- Rationaliser les actes médicaux et développer l’hospitalisation à domicile (HAD).
S’il n’est pas contestable que l’HAD relève du domaine public sur l’ensemble du territoire national, il ne peut se concevoir qu’en s’appuyant sur des réseaux de professionnels de santé uniformément répartis sur l’ensemble de celui-ci.
Force est de constater qu’à ce jour l’une des seules offres de santé de proximité répondant à ces critères reste le réseau officinal qu’il convient de renforcer et de stabiliser dans l’attente du redéploiement des autres offres de santé (médecine générale, infirmiers…). La profession est d’autant plus prête à se voir déléguer de nouvelles tâches, qu’elle a déjà su prendre à bras le corps et montrer son efficacité dans les renouvellements de nécessité et la sortie des médicaments de la réserve hospitalière.
Préambule : Professions règlementées – Principes pour conduire la réforme
1-Transposer et mettre en œuvre sans délai la directive «services» pour toutes les professions relevant de son champ.
L’ensemble des PSD, dont les pharmaciens, ont été exclus de la directive services en raison des implications de santé publique nationale qui font que l’organisation de ces professions doit relever de l’autorité de chaque Etat (principe de subsidiarité).
2-Supprimer toute réglementation pour toute activité où l’intérêt des consommateurs ne le justifie plus.
S’il existe bien un secteur où l’intérêt public en termes de points d’entrée dans le parcours de soins est essentiel, c’est bien le réseau pharmaceutique. Il convient en conséquence, eu égard aux besoins et risques sanitaires présents et à venir, de maintenir toute la réglementation démo-géographique.
3-Supprimer le numerus clausus dans les professions à l’accès aujourd’hui limité, sauf s’il est nécessaire pour garantir l’intérêt du consommateur et des entreprises, et s’il n’existe pas une solution alternative.
Là encore, le réseau officinal est à ce jour la seule profession de santé uniformément répartie sur l’ensemble du territoire Français. Il convient donc de maintenir les règles d’installation actuelles dans l’attente du redéploiement des autres professions de santé dont la carence est avérée : nous ne citerons pour l’exemple que la médecine générale, les soins infirmiers ou les soins de kinésithérapie.
4- Maintenir les réglementations et les dispositifs de contrôle de la compétence des professionnels et de surveillance de leurs activités nécessaires pour garantir la qualité du service au consommateur et aux entreprises.
Nous ne pouvons, compte tenu de ce qui précède, qu’adhérer à ce principe.
6. Remplacer les barrières à l’entrée par des mécanismes incitatifs positifs pour satisfaire les objectifs d’aménagement du territoire.
Tout mécanisme incitatif en matière de santé publique a systématiquement échoué, comme le démontrent les carences démo-géographiques de toutes les professions de santé à libre installation.
8. Dissocier la propriété du capital des entreprises actives dans les secteurs réglementés et leur exploitation.
En matière d’organisation de soins harmonieusement répartie sur l’ensemble du territoire, il est essentiel qu’il y ait une indivisibilité entre capital et exploitation afin de prévenir toute restructuration du réseau dont la vocation serait complètement capitalistique au détriment de la santé publique et de l’offre de soins de proximité.
Et enfin, cerise sur le gâteau, cette autre proposition du Rapport Attali (mais oui) :
Page 149 – décision 193 :
Intégrer dans les plans locaux d’urbanisme des obligations de diversité commerciale en faveur des commerces de détail ou de proximité.
Il est étonnant que le rapport ne fasse pas état de l’existant à savoir l’influence sociale et sociétale du réseau officinal, comme point d’amarrage attractif de centres de vie de proximité !
En tout cas, on peut se féliciter de cet attachement au service de proximité...