Forum » » Vers le futur » » Fin du quorum au sens strict?
Posté : 19-02-2014 17:50 
Citation : poussin_arverne
Vouloir la fin des quotas, je peux le comprendre.
Penser que cela favoriserait les jeunes pharmaciens désargentés, c'est une rêve complètement décalé ... Surtout si on pense qu'Internet est l'eldorado !
Je suis OK. Internet est loin d'être la panacée et la fin des quotas ne signifiera pas des créations de pharmacie viable à tous les coins de rue... Le coût d'une création (locaux, aménagement, stock...) est de plus loin d'être nul.
Néanmoins, le numérus clausus et la survalorisation/surcapitalisation des officines qu'il induit a clairement des conséquences délétères pour la profession à long terme:
- Le numérus clausus de formation reste paradoxalement élevé, car c'est sans conséquence pour les pharmaciens en place en raison du numérus à l'installation: Cela peut conduire à un surnombre de pharmaciens sur le marché, bénéfique pour les pharmaciens protégés par le numérus clausus, qui ont une main d'oeuvre abondante, donc moins couteuse, et plus d'acheteurs pour leur officine, mais source de paupérisation à long terme pour la profession (c'est ce qui s'est passé dans les années 1980 pour les architectes suite à l'accroissement des flux de formation).
- La cherté des officines, liée au déséquilibre entre l'offre et la demande, conduit à une financiarisation excessive, déconnectée des fondamentaux de l'exercice professionel, avec des plans de financement tendus, qui mettent rapidement en difficulté certains jeunes titulaires si la situation financière se retourne; le numérus clausus est donc ici pour ces jeunes un facteur d'insécurité et de risque, en raison de l'importance des remboursements.
- Les titulaires séniors dont l'officine est rembousée, peuvent au contraire, pour au moins certains, bénéficier d'une vraie rente de situation, ce qui ne va pas les stimuler à innover ou à faire preuve d'un dynamisme professionel; le retard important pris en France en pharmacie clinique par rapport aux pays anglosaxons le démontre.
- L'existence de quotas contribue à donner la mauvaise image d'une profession surprotégée pour la pharmacie, vis à vis du grand public et de beaucoup de décideurs, alors que certains pharmaciens (adjoints, intérimaires ou jeunes installés) sont dans la précarité.
- Enfin et surtout, le maintien d'une valorisation financière élevée des officines est "the objectif" à défendre pour beaucoup de pharmaciens titulaires; cela est effectivement tout à fait compréhensible sur un plan humain, mais cela n'a au final pas grand chose à voir avec la reconnaissance professionelle et le développement du métier de pharmacien (confère ma remarque précédente sur la pharmacie clinique).
Pour terminer, je suis même perplexe quant à la justesse de l'argument justifiant actuellement le numérus clausus (éviter des déserts pharmaceutiques en milieu rural): une profession très proche de la pharmacie dans sa façon d'exercer et de se structurer (les opticiens) n'a pas de quotas, et il y a pourtant de nombreux magasins d'optique en milieu rural et aucun désert "optique".
Le débat est de toute façon biaisé et il me semble très difficile, voire impossible, de remettre en cause les quotas aujourd'hui, en raison de l'importance des enjeux financiers pour les titulaires actuels. Ces quotas et la survalorisation artificielle induite des fonds de pharmacie constituent pourtant maintenant clairement à long terme un handicap structurant pour l'évolution de la pharmacie française en tant que profession de santé.
Une adaptation judicieuse et raisonnable des flux de formation à ces quotas d'installation serait à minima la solution à envisager, pour préserver l'avenir du plus grand nombre de jeunes diplômés... L'ordre des pharmaciens semble promouvoir exactement la direction inverse...Cherchez l'erreur?
Message édité par : parmentier / 19-02-2014 18:02
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